L’être humain est un être essentiellement social et non un être solitaire comme le défendait Jean-Jacques Rousseau. L’individu a besoin des autres pour survivre. La démocratie cherche une règle commune permettant de vivre ensemble, de s’accorder, de corriger les injustices et d’éviter les massacres. De fait, elle cherche à résoudre une contradiction qui naît des deux principes sur lesquels elle se fonde : 1) égalité des conditions d’accès pour tous au savoir, aux droits, etc… 2) indépendance, autonomie de chaque individu. C’est dire avec Jacques Rancière, que “la crise est consubstantielle à la démocratie”. Aujourd’hui, si l’on écoute Alexis de Tocqueville, ce serait l’individualisme qui menacerait notre démocratie : la conception que nous avons de la liberté moderne se fondrait sur le seul progrès de notre confort personnel… Le théâtre peut, modestement certes, s’opposer à cette dérive dangereuse en réveillant le sentiment du collectif. Oui, “le théâtre est bien un lieu de parole qui rassemble un groupe humain, mettant en présence réelle spectateurs et acteurs. Il contribue à maintenir l’usage d’une parole (sonore et signifiante) et reste de ce fait un lieu fondamental de la réorganisation sociale, où se maintient et se développe une culture commune (...). La notion de ce théâtre démocratique ne s’appuie pas sur le postulat totalitaire inepte que nous aurions tous à devoir être égaux et tous ensemble à fusionner dans une même émotion mais elle se fonde sur le fait que nous sommes tous semblables en tant que membres appartenant à la même espèce. Semblables et différents.
Théâtre et démocratie, conférence tenue par Hubert Jappelle le 26 mai 2005 à l’Université de Cergy-Pontoise.